Temps de lecture : 10 min.

1         Définition

A différence de la banque de détail (BDDF) qui s’adresse au grand public, la banque de financement et d’investissement ou BFI  (CIB ou corporate investment banking) propose ses services exclusivement aux grandes entreprises, aux institutions financières et aux institutions publiques. Elle s’occupe aussi des transactions à montant élevé. Les activités de la BFI sont souvent scindées en activités de bas de bilan pour la partie financement et en activités de haut de bilan pour la partie investissement. Cherchons à comprendre cette terminologie au regard du schéma simplifié du bilan d’une entreprise.

Actifs (Emplois, les crédits) Passif (ressources, les débits)
Haut de bilan (Long Terme) pour la banque d’investissement
ImmobilisationsCréances Fonds propres (vue comme la dette envers les actionnaires ou les propriétaires)Capitaux de réserveEmprunts LT
Bas de Bilan (Moyen terme, court terme) pour la banque de financement
StocksCréancesTrésorerie Dettes FournisseursDécouverts

Une banque de financement (corporate banking)  ou banque commerciale s’occupe des activités de dépôt et de crédit. Elle crée des crédits directs. Elle facilite des moyens de paiements en commerce international (crédit documentaire, lettres de change),  vent des services de gestion de trésorerie et aide ses clients à placer des investissements sur des produits financiers déjà existants. Elle est impliquée dans les opérations qui modifient les postes comptables du bas de bilan. Ce sont l’actif et le passif les plus liquides. Ce sont les actifs et les passifs circulants. La rémunération de la banque de financement provient des intérêts et des services autour de la gestion de l’argent. Dans toutes ces activités la banque risque ses fonds soit parce qu’elle a des participations dans les entreprises soit parce qu’elle prête son argent.

Une banque d’investissement (investment banking) se focalise plutôt sur les activités de conseil, d’intermédiation et d’exécution des opérations de haut de bilan, soit des écritures comptables qui représentent le long terme. Il existe aussi le concept de banque d’affaires. Il est de nos jours assimilé à celui de banque d’investissement. L’activité de la banque d’affaires s’intéresse à la  finance d’entreprise (corporate finance) et fait partie intégrante des activités de la banque d’investissement. Les autres activités majeures d’une banque d’investissement sont celles des marchés financiers (global capital markets) et celles des opérations de financement (structured finance).  La rémunération provient des honoraires facturés aux clients pour ses bons conseils juridiques et financiers. Dans toutes ces activités, la banque ne risque ses ni ses fonds ni son argent. Si une opération ne marche pas, elle risque par contre sa réputation.

Le terme « banque d’affaires » est l’équivalent de « merchant bank » en anglais. C’est une banque qui prend des participations dans des sociétés et monte des dossiers de financement d’entreprises. La partie financement sur le long terme (haut de bilan) et la partie conseil sont donc intimement liées. L’une peu faire appel à l’autre et vice-versa.

Par la suite seront développer  les services qu’offre la banque de financement et les domaines stratégiques ou peuvent se positionnées les banque d’investissement : les marchés financiers, la finance d’entreprise, le private equity, la finance structurée, la gestion d’actifs et la gestion des risques. Les différentes informations ci-dessous ont été collectées en visitant les sites internet de plusieurs banques. L’idée est de donner un premier aperçu sur ces sujets.

2         Banque de financement (BF, Corporate banking)

La banque de financement (BF, corporate banking) est l’activité d’intermédiation au cours de laquelle les dépôts sont convertis en prêts. Elle comprend aussi tous les services permettant aux clients de gérer leur argent et d’avoir une visibilité sur leurs opérations. Conscientes des particularités de des clients coporate, la BF segmente le marché par secteur industriel. Des services spécialisés sont créés par spécialisation du client (énergie, télécommunications, maritime, aéronautique, immobilier).  Suivant la stratégie de la banque, celle-ci visera les PME-PMI, les multinationales, les institutions publiques ou les institutions financières. Dépendant de la taille de leur réseau, la présence des BF sera de type nationale, régionale ou internationale. Ainsi la BF propose  toute une panoplie de services dans le but de fidéliser ses clients.

Une fois que les activités  de conseil de banque d’investissement tablent sur un produit financier ou la meilleure façon d’emprunter, la BF se charge d’engager ses moyens. Elle mettra en place soit des crédits directs pour des financements court terme, soit des crédits-bails (leasing) pour l’achat d’un moyen de production (immobilier, véhicules). Elle pourra de même allier ses efforts avec d’autres confrères dans le but de financer un projet  auquel elle n’aurait pas pu faire face toute seule (crédits syndiqués ou syndicated loans).

En commerce international, une banque peut faciliter les opérations d’import-export avec les remises documentaires et les crédits documentaires. La remise documentaire est une technique d’encaissement par laquelle l’exportateur donne mandat à sa banque de remettre des documents d’export à la banque de l’importateur, qui les remettra à son client. C’est initié par le vendeur-exportateur et convient quand la confiance règne entre les négociants. Le crédit documentaire est la promesse donnée par le banquier de l’importateur à un exportateur étranger selon laquelle le montant de sa créance lui sera réglé, pourvu qu’il apporte, à l’aide de documents énumérés, la preuve de l’expédition des marchandises à destination du pays importateur. C’est initié par l’acheteur-importateur et c’est beaucoup plus sécurisé que la remise documentaire. La BF met en général à disposition un portail informatique ou les exportateurs peuvent suivre les étapes de création de crédits documentaires ou  de contrôler les garanties de livraison. Elle active aussi son réseau de banques correspondantes gérant les relations avec les partenaires commerciaux de ses clients.

De point de vue comptable, les autres postes auxquels peut s’attaquer une BF sont les créances et les dettes fournisseurs (accounts receivables and accounts payable). Soit la BF facilite l’infrastructure et l’automatisation de paiements de factures, soit elle vend des services  d’affacturage (factoring : relance et recouvrement, suivi des créances) et d’escompte (génération de trésorerie par vente de créances client). Certaines banques appellent ceci les services de supply chain. Si les achats sont effectués par les employés dans l’exercice de leur profession, le service de cartes bancaires facilitera la gestion des frais professionnels.

La BF peut adresser ses services au trésorier des entreprises. Voyons de façon simplifiée comment ce dernier raisonne et en donnant quelques définitions

Actif=Passif

Immos+Stocks+Créances+Tréso=Fonds Propres+EmpruntsLT+ dettes Fournisseurs+Découverts

Tréso= (Fonds Propres+EmpruntsLT-Immos)-(Stocks+Créances-dettes Fournisseurs- Découverts)

Tréso=Fond de Roulement – Besoin en Fond de Roulement

TR=FR-BFR

Si le FR (fond de roulement) reste « constant » sur le court terme, le trésorier devra équilibrer cette formule à son avantage. Il tâchera de maintenir une trésorerie positive ou proche de zéro recourant à des produits financiers liquides en cas de besoins de caisse. Les BF mettront à disposition leurs  systèmes de paiements et de gestion et centralisation de trésorerie et l’infrastructure l’accompagnant (canaux sécurisés, accès au chambres de compensation, accès aux banques correspondantes). Ainsi, un portail informatique dédié au « cash management » permet d’initier des paiements, de contrôler les autorisations lors de ces initiations, de recevoir des rapports sur les comptes. Ce genre d’offre de services fournit au trésorier une vue d’ensemble sur les comptes et ses flux puis sur le statut des paiements initiés.

L’offre de services peut s’étendre sur des portails d’exécution d’opérations de change (sport, forwards, swaps) ou de  pre-trade, exécution et  post-trade sur les marchés des capitaux (commodidties, titres, produits indexés). La BF exerce donc le métier de gestion de portefeuille et joue le rôle dépositaire de titres. Elle s’adapte même aux croyances de ses clients avec des départements spécialisés en finance islamique.

3         Marchés financiers (Equity capital markets)

L’ECM est l’activité de services financiers offerts par rapport aux instruments financiers émis par les clients.

Dans le marché primaire, l’activité est guidée par la bourse et les privatisations. La banque d’investissement (BI) gère la relation avec ses clients ayant comme objectif la création de nouveaux produits financiers. Les services  sont les suivants :

  • L’origination est  l’analyse financière sur les aspects de financement. Si une grande entreprise veut un prêt, quel type de produit financier devra-t-elle acheter ? Un prêt direct ? des obligations ? des actions ? On peut dire que c’est l’analyse de la situation.
  • Conseil et arrangement : Si après l’origination, le client est d’accord sur l’instrument financier qui lui est conseillé, disons des obligations, la banque s’occupe des aspects fiscaux, légaux et financiers de la matérialisation du produit.
  • Vente et placement : La banque organise la commercialisation auprès de son réseau commerciale, d’autres banques et acheteurs. Les IPO (initial public offer) font partie de cette activité de vente.
  • Underwriting : si la banque mandatée dans la vente ne réussit pas à vendre toute l’émission de produits financiers, elle s’engage à les acheter. Il en va de sa réputation pour ne pas se trouver dans cette situation.

Le marché secondaire est le marché des titres d’ « occasion ».  Après l’émission des titres ceux-ci peuvent être achetés et vendus.  Parmi les services proposés on trouve :

  • Le courtage (Brokerage) : c’est l’intermédiation dans l’achat et la vente de titres pour un client. La BI rapproche l’offre et de la demande et se rémunère avec une commission. Par exemple, un holding peut convoquer des BI et les mettre en concurrence parce qu’elle doit vendre de titres pour payer une dette que lui exige un débiteur avant une date donnée.
  • Le dealing : c’est l’achat et la vente en continu pour compte propre de la BI pour en tirer un profit.
  • Le rôle d’animateur de marché (Market making) : La BI signe un contrat avec son client par lequel elle s’engage à coter un instrument financier de son client coporate à la vente et à l’achat. La banque favorise la liquidité de l’action, réduit les coûts des opérations, fait la promotion des titres et peut contrôler des volatilités non-désirées. Lors de chaque achat-vente elle prend une commission (spread).

4         Corporate finance

Lorsqu’une entreprise choisit une stratégie financière donnée, la BFI l’aide à la mettre en place. Cette activité peut se décomposer en plusieurs types d’interventions :

  • Acquisition : C’est l’achat d’une entité par une autre. Par exemple, une entreprise A mandate une BFI de lui trouver une entreprise de production d’engins électroniques en Chine.
  • Merger : Après l’achat, la fusion juridique des deux entités peut avoir lieu
  • Spin off : Ceci peut être la séparation d’une partie des actifs ou des passifs  du bilan (réduction des immobilisations) ou la scission d’une entreprise en deux avec une création d’un nouveau titre pour la partie séparée.
  • Break up : c’est la division d’une société par activité. Par exemple, une compagnie aérienne est vendue à la découpe par lignes métier (transport de passagers, transports de marchandises, logistique des aéroports, activité des agences de voyages)
  • Carve out : une entreprise vend les parts minoritaires de l’une de ses filiales
  • Coentreprise (Joint-venture) : c’est une partenariat ou alliance temporaire entre plusieurs entreprises de sorte à partager les frais d’investissement, les risques et les gains.
  • Les restructurations s’occupent de l’assainissement des comptes d’une entreprise. Une restructuration peut se passer sans procédure judiciaire. Si l’intervention à lieu sur le passif, l’entreprise a une crise de liquidité, alors la banque peut acheter les obligations de l’entreprise et les réémettre avec des échéances plus longues. Une autre possibilité serait, par exemple,  de transformer des obligations en actions. Si  la vente vise les actifs, céder des actifs qui ne rapportent rien au niveau opérationnel (excès de matériel en stock) peut générer de la liquidité. Si la restructuration a lieu durant  la procédure de mise en liquidation, un cadre juridique guide les opérations de redistribution du passif et de l’actif.

Les services en M&A font appel à d’autres activités de la BFI comme l’origination, le conseil, les prêts. Ce sont les activités de marché des capitaux et de banque de financement.

5         Private equity

Dans l’activité de « Private Equity », la BFI investit pour compte propre dans des titres de sociétés non-cotées en bourse. Ces titres ont une liquidité basse et il est très difficile d’en évaluer le prix. La BFI devra décider si elle investit directement ou via une structure telle que les OPCVM, si elle sera actionnaire majoritaire ou minoritaire et à quel moment dans le cycle de vie (start up, croissance, maturité, crise).  Approfondir le sujet du « private equity » serait équivalent à parler de la participation d’une entité morale dans la gestion d’entreprise. Selon le type d’engagements pris, la banque peut participer en tant qu’actionnaire dans les assemblées générales ou au conseil de surveillance. Si elle est majoritaire, elle peut nommer les dirigeants et influer directement sur la stratégie de l’entreprise. Le private equity est complémentaire avec le « wealth managemen »t car quel est le meilleur endroit pour trouver ses investisseurs si ce n’est parmi si clients fortunés.

6         Finance structurée (Structured finance)

La finance structurée englobe les activités nécessitant un grand investissement initial sous forme de prêt et générant un cash-flow qui garantit le remboursement des fonds de financement.

Les projets de grande dimension et à haut risque, comme les constructions d’ingénierie civile (tunnels, ponts, barrages), font appel  à une banque ou à un groupe de banques. Vue l’ampleur de l’investissement, aucun acteur privé n’est capable d’en assumer le risque à lui seul. Un fond commun de créances (FCC ou SPV, special purpose vehicle) est créé. Dans l’actif du bilan de cette entité se trouve l’œuvre d’ingénierie et au passif la structure du prêt façonné par le cash-flow du projet. Le cash-flow peut être soutenu par des lois et des décrets publics. S’il s’agit d’une route, les péages rempliront les caisses sur le très long terme.

Pour les LBO (leveraged acquisition / leveraged buyout), une structure juridique est créée afin d’acheter une entreprise. L’actif de cette entité juridique est composé du cash-flow (bénéfices) généré par l’entreprise achetée. Le passif comporte les fonds propres des investisseurs et l’emprunt pour l’achat de l’entreprise. Il est sous-entendu que la rentabilité de l’entreprise achetée est supérieure au taux du crédit. Ce type de montage peut mener au retrait de la cotation d’une société anonyme.

La Titrisation (securitization) est la vente d’une activité du bilan comme produit financier appelé ABS (asset backed securities ou titre adossée à des créances). L’exemple le plus connu est celui des  subprimes ou les emprunts immobiliers sont vendus comme des titres, les RMBA (residencial mortgage backed securities). Les remboursements effectués par les emprunteurs constituent le gain sur les titres. La titrisation a des avantages pour les banques. C’est une source de financement moins cher que les prêts accordés par la banque centrale ou par le marché interbancaire. En titrisant, les créances sortent de l’actif, ce qui favorise le respect des ratios de solvabilité imposé par Bâle II et III. Finalement, le risque de crédit est transféré au FCC qui se dotera d’un mécanisme de couverture pour y faire face.

7         Gestion d’actifs (Asset management)

Comme son nom l’indique, la gestion d’actifs ou « asset management » est un service de gestion d’actifs (des possessions  financières et non financières) offerts par la banque pour le compte d’un tiers. Le public visé peut être une personne dont la fortune atteint un montant conséquent. Dans ce cas-là, ça s’appelle plutôt « wealth management ». S’il s’agit d’immobilier, la banque aura surement une entité « real estate ». La gestion de portefeuille d’actions peut aussi être incluse dans cette branche du métier de banque d’investissement.

Dans le cas du « wealth management », le conseiller cherche à établir un plan d’ingénierie patrimoniale puis à conserver ou plutôt augmenter la valeur des actifs qui lui sont confiés.  Il y aura une phase d’orientation au cours de laquelle le client fixera ses choix sur les achats et investissement qu’il voudrait réaliser (constitution d’une pension, achat d’un bien immobilier, succession, etc…). Avec le pouvoir de gestion accordé au banquier, matérialisé par le mandat de gestion, les produits financiers sont conçus et sélectionnés puis des ordres sont exécutés dans le marché des capitaux.

8         Gestion des risques (Risk management)

Les banques se sont caractérisées par  la création de produits dérivés tels que les forwards, les futures, les options et les swaps. Ces produits financiers peuvent être utilisés pour couvrir les risques d’intérêt ou le risque de crédit. Si les sous-jacents ne sont plus des titres mais des évènements avec une probabilité  quelconque de se produire, la banque commence à empiéter dans les activités de l’assurance. L’exemple le plus parlant est  celui des CDS ou « credit default swaps ».

Les CDS peuvent être assimilés à des polices d’assurance. Les titres assurés seront par exemple des bonds. L’entité qui s’assure ses bonds paye une annuité (premium) et se protège contre un événement de défaut bancaire de la contrepartie émettant les bonds  (impossibilité de paiement, banqueroute ou autre). Les CDS peuvent être perçus comme un pari sur la défaillance d’une entreprise. D’un autre côté, et au-delà de ces intentions spéculatives malveillantes, le CDS peut permettre à une entreprise en besoin de fonds de s’en procurer plus facilement. Supposons que la politique d’un fond d’investissement soit de n’investir que sur des entreprises ayant une note A+ dans l’échelle d’une agence de notation quelconque. Si l’entreprise  de l’exemple considéré est notée A-,  le fond d’investissement ne pourra pas lui accorder le crédit sous forme de bonds. Cependant un montage financier avec une BI, dont la note est A+, peut contourner cet empêchement et satisfaire tous les trois entités. Le fond d’investissement peut donc acheter les bonds émis par l’entreprise. En même temps, la BI adosse à ces bonds un CDS, ce qui a pour effet de relevé la note de A- à A+ car la BI se porte garante. L’entreprise paye des intérêts sur ses bonds à un taux annuel T. Le fond d’investissement gagne  ces intérêts et en reverse un partie à la BI qui correspond au forfait annuel (premium) de la police d’assurance (CDS).